D. Schnapper L'absence d'activité professionnelle [des retraités] est justifiée par leur âge et par leur emploi passé qui les a autorisés à " faire valoir leurs droits à la retraite ". On constate donc qu'ils se sentent pleinement autorisés à adopter des comportements dits de loisir - jouer aux boules ou aux cartes, lire, regarder la télévision, bricoler comme ils l'entendent ou ne rien faire. Le passage à la retraite est parfois difficile, mais il ne remet pas en question la dignité du retraité. Ce n'est pas le cas du chômeur qui " devrait " - en fonction de la norme du travail - avoir un emploi. C'est pourquoi il a un sentiment d'humiliation. Il s'ennuie, parce que le temps est déstructuré. C'est en effet l'exercice d'une activité professionnelle qui donne son sens au temps : ne pas avoir d'emploi, parce qu'on est chômeur, ce n'est pas être en vacances ou avoir des loisirs. Le chômeur ne se sent pas le droit d'adopter des activités de vacances, il ne peut pas jouer aux boules comme le retraité, il doit être un " bon " chômeur qui cherche du travail. Dominique Schnapper, Contre la fin du travail, Textuel, 1997, p. 48. |